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La dimension des soins dans les Maisons d’accueil spécialisées et les Foyers d’accueil médicalisés de la région Nord – Pas-de-Calais (2014)

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Date de parution: 
le 16 Mai 2014

Le CREAI anime depuis de nombreuses années un groupement des professionnels de MAS et de FAM[1]. Fin 2012, le groupement a décidé de mettre en place un groupe de travail sur la question de l’accès aux soins des personnes accueillies au sein de ces établissements. Une étude a ainsi été réalisée en 2013 sur « La dimension des soins dans les MAS et FAM de la région Nord-Pas-de-Calais  ».

Cette étude donne à voir que l’évolution des besoins de soins des personnes accueillies et orientées amène les établissements à s’interroger sur leur identité. La question des limites de l’accompagnement prend une place de plus en plus importante, notamment en raison du vieillissement des publics accueillis : jusqu’où les établissements peuvent-ils et doivent-ils s’adapter à l’évolution des besoins des personnes tout en préservant leur identité médico- sociale ?  En effet, comme le souligne l’un des participants du groupe de travail, les MAS et les FAM sont « des lieux de vie dans lesquels on peut se soigner, pas des lieux de soins dans lesquels on peut vivre ».

La prise en charge des soins en interne apparaît souvent compliquée. De plus en plus technique et parfois ressentie comme « envahissante », elle se heurte aux limites des compétences professionnelles et des moyens, tant humains que matériels, techniques et financiers.

L’accès aux soins reste problématique de manière générale, que ce soit en interne ou en externe. Cette inaccessibilité n’est pas qu’architecturale : si les structures et le matériel sont encore loin d’être adaptés aux besoins des personnes, le manque de formation et de sensibilisation des professionnels de santé au monde du handicap n’est pas sans  conséquences sur l’accueil et la prise en charge des personnes en situation de handicap. Ce fait est largement souligné.

Ainsi, de nombreux établissements développent des partenariats avec des professionnels de santé libéraux ou des structures de soins. Mais ces conventions doivent être le fruit d’un travail collectif et d’une volonté commune entre les acteurs pour qu’elles ne soient pas « que du papier ».

Si cette étude témoigne des difficultés rencontrées par les professionnels de MAS et de FAM dans leur travail d’accompagnement aux soins, elle ne rend cependant pas compte de ce que pensent et vivent les professionnels de santé dans leur prise en charge des personnes en situation de handicap. C’est pourquoi les membres du groupement des MAS et des FAM ont souhaité poursuivre ce travail en y associant des professionnels de santé.

C’est dans ce contexte qu’a été organisée, le 22 mai dernier au CREAI, une rencontre entre professionnels des MAS et des FAM, représentants de l’ARS et acteurs de terrain du secteur sanitaire. Une soixantaine de personnes, professionnels du secteur médicosocial et du sanitaire, personnels soignants ou éducatifs, cadres ou accompagnants de terrain, acteurs institutionnels, se sont donc retrouvées le temps d’une matinée pour échanger, à partir des résultats de cette étude, sur la nécessaire complémentarité entre acteurs pour faciliter l’accès aux soins des personnes en situation de handicap.

Cette thématique est fortement d’actualité, comme l’a souligné Mr Reynald LEMAHIEU, Directeur du pôle de proximité Littoral à la Direction de l’offre médicosociale de l’ARS, dans son propos introductif: rapport Jacob[2], recommandations de l’ANESM de juillet 2013[3], rencontre du Comité Interministériel du handicap en septembre 2013 dont l’un des axes est la prévention, l’accompagnement médico-social et l’accès aux soins[4], ... autant de travaux qui démontrent que l’accès aux soins des personnes en situation de handicap est une problématique portée par nombre d’opérateurs. Et elle l’est tant à l’échelle nationale que régionale ; en effet, à travers son Programme Régional de Santé[5], l’ARS décline également ces priorités :

  • Développer la prévention pour ces publics
  • Rendre lisible leur parcours de soins 
  • Travailler l’axe formation initiale
  • Améliorer le lien entre l’ambulatoire et le secteur hospitalier
  • Promouvoir les passages des Services de Soins de Suite et de Réadaptation aux soins en ambulatoire

Toutes ces orientations visent à favoriser la continuité du parcours de la personne, entre les établissements, les services et le domicile.

Ainsi, deux démarches vont être menées conjointement par l’ARS :

  • Une action avec les Conseils Généraux afin de mieux articuler les SAVS et les SAMSAH, les SSIAD PH et le domicile
  • Une action avec les établissements concernant l’Hospitalisation A Domicile : il s’agit de former les services d’HAD au monde du handicap et les professionnels des établissements médicosociaux au dispositif d’HAD.

Le Dr CHARANI, médecin coordonnateur du service d’HAD Synergie, est intervenu lors de cette matinée pour présenter l’HAD de façon globale : ses modalités de mise en œuvre, les différents modes de prise en charge,  l’organisation du suivi et les modalités de sortie. Il a insisté sur l’attention particulière accordée à la prise en compte de la douleur et sur la nécessité de définir clairement et de façon partagée le projet d’intervention en amont de sa mise en œuvre. Ainsi, il ne s’agit pas de « prendre la place de l’établissement médicosocial », mais bien de travailler avec lui, de façon complémentaire, pour répondre aux besoins de soins des personnes accueillies et éviter ainsi des hospitalisations qui peuvent être perturbantes pour les personnes. La prise en charge se veut donc globale et pluridisciplinaire et n’est mise en œuvre qu’avec l’accord de la personne et de son médecin traitant, en prenant en compte son environnement social et géographique.

Cette dimension de prise en charge globale et partenariale est également forte dans le travail mené par les SSIAD, que ce soit à domicile ou en établissement, comme a pu l’expliquer Mme ALLENTIN, directrice du pôle soins de l’ASSAD de Dunkerque. Ainsi, ce service a développé de nombreux partenariats sur son territoire, auprès d’acteurs médicaux, paramédicaux, hospitaliers, institutionnels et associatifs ; il fait également partie du Comité Territorial mis en place sur le Dunkerquois. Ces partenariats permettent notamment aux professionnels du SSIAD de mieux appréhender les spécificités liées au handicap des personnes accompagnées. Ces spécificités s’inscrivent sur le plan environnemental, familial et social mais également dans le rapport qu’ont ces personnes à leur suivi de santé : selon le handicap, certaines personnes de moins de 60 sont particulièrement « actrices » de l’organisation de leur suivi et peuvent avoir plus d’exigences dans sa mise en œuvre ; certaines ont également un rapport plus familier avec les professionnels (tutoiement, …) et essaient de tisser des liens avec eux.

Mieux appréhender les spécificités du handicap et se former à l’accueil des publics handicapés est devenu un enjeu important également pour les professionnels de santé des structures hospitalières.

Ainsi Mme DANNA, coordinatrice générale des soins à l’hôpital Swynghedauw (SSR) et à la transversalité handicap du CHRU de Lille a présenté le travail mis en place au CHRU pour faciliter l’accès aux soins des personnes en situation de handicap.  Le programme « Transversalité Handicap » s’appuie sur deux axes de travail principaux : l’accessibilité et la formation. En ce qui concerne l’accessibilité, un audit a été réalisé et a permis d’aboutir à différentes actions : travaux d’aménagement, achat d’équipements, création d’une salle de consultation gynécologique et obstétrique avec matériel adapté, création d’une chambre adaptée en maternité et gynécologie, …. L’axe de formation a été conçu à partir du parcours du patient et à l’intention de tous les professionnels intervenant dans ce parcours (personnel d’accueil, personnel technique, personnel médical et paramédical, …) : formation du personnel d’accueil, formation à l’installation du patient, accueil de la femme handicapée en maternité, …  Une équipe mobile Rééducation, Réadaptation et Orientation intervient dans les services de courts séjours afin d’apporter son expertise en vue de fluidifier les parcours des patients dépendants, de prévenir les situations de handicap et de former les équipes soignantes. Les professionnels de cette équipe mobile exercent également une veille pour les séjours longs et travaillent en partenariat avec la cellule transversalité handicap afin de lui faire part des différentes observations qu’ils peuvent faire dans leur travail quotidien.

Mme ERIPRET, chargée de mission accès aux soins des personnes handicapées au DESPAH (Direction des Etablissements et des Services Personnes Agées - Personnes Handicapées) du GHICL (groupement des hôpitaux de l’Institut Catholique de Lille) a présenté quant à elle le travail mis en œuvre au sein du GHICL pour améliorer l’accueil des personnes en situation de handicap dans le service des urgences. Trois principaux enjeux ont été définis : l’accès du cadre bâti (amélioration du cheminement extérieur de l’hôpital St Philibert), l’accès « information, communication, formation » et l’accès aux soins. L’axe sur la formation est travaillé en lien avec l’UCL (Université Catholique de Lille) qui intervient sur la formation initiale dans le secteur santé-social. L’axe sur l’accès aux soins a abouti à la création d’un groupe de travail « conventionnement » réunissant le service des urgences de l’hôpital St Philibert et différents établissements et services médicosociaux. Cinq axes de progrès ont ainsi pu être identifiés : une meilleure connaissance des différents acteurs, la passation des informations, les échanges d’expériences, la formation de « bonnes pratiques » et les directives anticipées. Différents outils ont alors pu être construits collectivement (fiches d’identité, outils de liaison, …). La dynamique de travail se poursuit et plusieurs axes restent à travailler : le rôle de l’accompagnant familial / professionnel, le passage des urgences vers l’hospitalisation, le retour en établissement médicosocial, la mise en place de l’HAD depuis les urgences et l’accueil de publics spécifiques.

Ces différentes interventions ont été ponctuées d’échanges avec la salle. Des expériences ont ainsi pu être présentées et des questionnements ont été partagés.

Cette rencontre avait pour objectif de créer un espace d’échanges, de dialogue pour une meilleure interconnaissance et une meilleure appréhension de la réalité du travail de chacun. Il s’agissait de poser les premières pierres pour lancer une dynamique commune et aboutir à une synergie qui serve les besoins d’accès aux soins des personnes en situation de handicap dans notre région. Elle a permis d’observer que l’amélioration de l’accès aux soins des personnes handicapées est un objectif porté également par les acteurs du secteur sanitaire et qu’ils sont eux-mêmes en demande de partenariat avec les professionnels du secteur du handicap. Par exemple, comme l’a expliqué Mme DANNA, si la présence d’un professionnel d’établissement médicosocial est requise lors de l’hospitalisation d’un résident, c’est parce que les professionnels de la structure hospitalière peuvent se sentir démunis pour accueillir cette personne et craindre de « mal faire ». C’est donc ensemble et en complémentarité que l’accès aux soins des personnes handicapées doit se travailler. En effet, ce n’est qu’en travaillant conjointement au décloisonnement entre « le monde du sanitaire » et celui du « médico-social » que la personne en situation de handicap pourra véritablement accéder à un parcours de soins et de santé.

 

Marie-Nöelle CADOU

  Muriel DELPORTE

Conseillères techniques

 

« Il n’y a pas de bons soins sans bon accompagnement,

il n’y a pas de bon accompagnement sans bons soins. »

(Rapport de Pascal Jacob sur l’accès aux soins et à la santé des personnes handicapées)

 

[1] Le groupement MAS/FAM a pour vocation d’offrir un espace de rencontre et d’échanges aux professionnels de Maisons d’Accueil Spécialisées et de Foyers d’Accueil Médicalisé. Si vous êtes intéressés par ces travaux vous pouvez contacter Muriel Delporte, conseillère technique : mdelporte@creainpdc.org , tél : 03 20 17 03 03.

[2] http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport-pjacob-0306-macarlotti.pdf

[3] http://www.anesm.sante.gouv.fr/IMG/pdf/ANESM-Synthese-Accompagnement_personne_handicapee-Juillet_2013.pdf

[4] http://www.social-sante.gouv.fr/evenements-colloques,2396/comite-interministeriel-du,2820/accompagnement,2825/evenements-colloques,2396/comite-interministeriel-du,2820/accompagnement,2825/acces-aux-soins-et-a-la-sante,2845/acces-aux-soins-et-a-la-sante,16299.html

[5] A travers les schémas de prévention, d’accès aux soins (SROS), et d’organisation médico-sociale (SROMS)

Interventions de :

Dr Charani, Had synergie

Mme Allentin, Assad

Mme Danna, CHRU

Mme Eripret, GHICL

Mme Delporte, CREAI

 

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